Avis BD Glénat : Sans voix (histoire complète)
Notre bande dessinée du jour nous emmène sur l’île de Mokmok, où le silence est de mise. En effet, après ce qu’on nous décrit comme « des épisodes d’une grande violence », les habitants ont été privés de leur bouche et sont devenus incapables de communiquer par la voix. Tout le monde en est réduit à s’envoyer des messages par téléphone ou sur papier, sauf notre héros Awarè, un garçon à queue de raton laveur passionné de musique qui a toujours la possibilité de parler ! Soudainement, sa vie va être chamboulée par sa rencontre avec Rebi, puis Moroi, et il va se retrouver au cœur d’un trio qui mêle amour, amitié, et communication. L’ouvrage, disponible le 27 août 2025, est lui aussi signé par un trio : Alessandro Atzei et Manuele Morlacco au scénario, et Lidia Bolognini au dessin. C’est parti pour notre avis.
Synopsis : Il règne une drôle d’ambiance sur l’île de Mokmok, où une nouvelle génération d’individus avec une apparence animale vit dans le silence. Car après des épisodes d’une grande violence, le maire de la ville, convaincu que la cause de tous les problèmes provient des médisances, des ragots et des discours haineux, a tout simplement supprimé la parole. Comment ? En privant les habitants de leur bouche. Depuis, les rues sont plongées dans un silence opaque. Les gens communiquent par écrit, via des messages sur leurs téléphones ou par notes manuscrites. Seul un type d’individus peut encore s’exprimer : les poètes. Awarè, un garçon à queue de raton laveur passionné de musique, fait partie de ces rares cas. Orphelin, il possède encore sa bouche car il aime trop chanter. Sa vie bascule lorsqu’il croise la route de deux camarades : Rebi, une jeune fleuriste en difficulté, et Moroi, la fille du maire, triste et solitaire. L’ouvrage est à découvrir sur le site de l’éditeur, à cette adresse.
Commençons par parler du travail de Lidia Bolognini ! « Sans voix » emprunte énormément au manga, du design des personnages à la mise en scène dynamique. L’ouvrage est superbe, très réussi en termes de couleurs, et propose de grandes illustrations détaillées. Les décors sont variés, et certaines belles idées de mise en scène viennent agrémenter un ensemble déjà très immersif. Mention spéciale pour nos personnages, aux regards très expressifs. Précisons que ces derniers ont un aspect animalier, avec parfois des cornes, des oreilles ou bien une queue. Une idée intéressante mais pas forcément exploitée davantage dans le récit, et ce détail passe assez rapidement au second plan. C’est l’histoire qui prédomine, avec des relations qui se développent rapidement entre les différents personnages, et un Awarè ayant les fesses entre deux chaises. C’est bien écrit, et l’ouvrage aborde des thèmes importants liés à l’amitié, à l’amour, mais surtout à la communication. Dans une société où il n’est plus possible de parler, d’autres moyens sont mis en place pour exprimer ses sentiments. À une époque où nous devrions poser nos téléphones pour communiquer davantage verbalement, c’est l’inverse qui se produit ici.
Au-delà de son univers original et de son esthétique très inspirée du manga, « Sans voix » interroge notre rapport à la communication. Le mutisme imposé aux habitants de Mokmok symbolise une société où la parole, jugée trop violente, a été étouffée pour préserver la paix. Mais priver les individus de voix, c’est aussi leur retirer une part essentielle de leur humanité, leur capacité à partager émotions, idées et sentiments. Dans ce contexte, Awarè occupe une place particulière : il a conservé sa bouche et, surtout, il aime chanter. Le chant devient alors bien plus qu’une passion personnelle : c’est un acte de résistance, une manière d’affirmer son identité et de rappeler que la parole, même sous une forme poétique et musicale, reste indispensable pour créer du lien, et encore plus avec ses nouvelles rencontres. Son don résonne comme une métaphore puissante : la musique et l’art sont capables de franchir les barrières imposées et de redonner une voix à ceux qui n’en ont plus.
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