TEST : Bomb Rush Cyberfunk, la suite spirituelle de Jet Set Radio ? (Nintendo Switch)
Au tout début des années 2000, sur Dreamcast, Sega propose un nouveau jeu qui va imposer son style : Jet Set Radio. Prenant ses bases dans la culture des années 90, il mélange trois ingrédients détonants : des phases de jeu en rollers, des graffitis et une bande-son mêlant rock, hip-hop et électro. Malgré un succès critique évident et une suite, Jet Set Radio Future, tout aussi excellente sur Xbox, la licence n’a pas été exploitée par la suite, à un remaster près qui a plus d’une dizaine d’années. Même si nous savons désormais que la licence signera son grand retour, ce qui a été annoncé lors des derniers Game Awards, pendant longtemps tout le monde a pensé qu’elle resterait à la cave. De fait, la Team Reptile, un studio néerlandais créé en 2011 auquel on doit notamment Lethal League et Lethal League Blaze, a décidé de créer une suite spirituelle baptisée Bomb Rush Cyberfunk. Si la version numérique est sortie le 18 août dernier, nous profitons de l’arrivée récente de la version physique du jeu pour vous proposer notre critique grâce à un code Nintendo Switch fourni par l’éditeur. Est-ce bien une suite spirituelle ? Surtout, est-ce réussi ? Réponse dans les lignes qui suivent !
Une fidélité à en perdre la tête ?
Après une introduction posant les bases du scénario et camouflant plus ou moins le didacticiel, Bomb Rush Cyberfunk nous invite à retrouver une formule très proche de Jet Set Radio. Bien entendu, ce qui tape à l’œil en premier, ce sont les visuels. Le design s’inspire clairement du modèle et la partie cel-shading, plutôt léchée, laisse à penser qu’on pourrait avoir un petit frère ou un cousin de Jet Set Radio. Sur Nintendo Switch, si on omet quelques errances du côté des ombres et des inégalités dans le traitement visuel des personnages, on ne peut que saluer la prestation. Le rendu est joli, c’est coloré et les maps sont parfaitement lisibles, permettant d’identifier rapidement les modules que l’on peut grinder ou sur lesquels on peut exécuter des wallruns notamment.
Les différents quartiers (en zones ouvertes) sont assez variés et les maps gagnent en verticalité pour pousser à l’exploration. Plus vous maîtriserez le gameplay, plus vous prendrez du plaisir à gagner de la hauteur. Il n’y a pas à dire, visuellement, c’est réussi et on retrouve bien les codes de l’époque, jusqu’au téléphone à clapet qui sert de menu interactif géré avec la croix directionnelle. Techniquement, la petite équipe a bien bossé également. Certes, les chargements sont longuets, il y a un léger aliasing ci et là (mais rien de vraiment dérangeant) et notre console a crashé deux fois sans raison… Mais pour le reste, il faut reconnaître que le titre tourne bien et que les enchaînements sont fluides. On ne ressent pas de chute de framerate et on peut donc se concentrer sur l’essentiel.
La bande-son, véritable force des JSR, était forcément attendue au tournant. Même si elle est moins marquante, la faute peut-être à notre mémoire qui embellit les souvenirs du passé, il faut avouer que celle de Bomb Rush Cyberfunk est très bonne. Et pour cause, on retrouve à la baguette Hideki Naganuma, le compositeur des BO des Jet Set Radio. Pour la petite information, il avait collaboré plus tôt avec le studio pour composer un titre de la bande-son de Lethal League Blaze. On retrouve donc des sonorités typées hip hop, rock, funk et électro. On peut même changer les musiques via son téléphone. C’est un régal et ça permet de compenser les petites faiblesses des dialogues qui trahissent un manque de budget. Fort heureusement, les sous-titres français sont là.
Ce n’était pas forcément le point le plus attendu mais l’histoire de BRC a été plutôt travaillée toute mesure gardée. Sans trop spoiler, on débute en incarnant BG (pour Beau Gosse), un personnage qui est en prison et dont nous vous laissons le soin de découvrir l’identité (dans les quelques minutes qui suivent). Sans trop de raisons, le commissariat est vide et il se fait libérer par Tryce. Les deux s’évadent et au moment du grand saut, le méchant de l’histoire apparaît et notre héros perd la tête… Littéralement. Il se réveille plus tard, avec une tête robotique rouge. Baptisé alors Red, il va partir en quête de sa tête, ce qui va passer par le fait de devenir All City avec son nouveau gang, le Bomb Rush Crew composé au début de Tryce, Bel et Red donc (le recrutement élargira les rangs). Pour cela, il va falloir défier les cinq autres gangs de la ville, une fois celui des basketteurs défait. S’il est clair que le gros de l’aventure consiste à répéter encore et encore le même schéma de progression, il est bon de noter que l’histoire progresse au fil des succès, avec même quelques petits rebondissements. Bref, ça se laisse suivre avec plaisir.
Quant à la progression, comme indiqué, elle est assez répétitive dans la forme. Pour s’attaquer à un gang, il faut d’abord recouvrir leurs tags par ses graffitis pour gagner de la réputation. Ensuite, on peut défier quelques membres du gang adverse, avec des objectifs assez variés basés sur la compétition ou la reproduction des mouvements de l’adversaire, avant d’affronter le crew adversaire dans une épreuve technique demandant de faire le plus de points dans le temps imparti. Pour pimenter les parties, les développeurs ont également ajouté des niveaux plus psychédéliques dans les rêves, avec une approche bien plus basée sur la plateforme, mais également le fameux système de policiers. En effet, on ne peut pas dégrader le mobilier urbain impunément. Ainsi, la police intervient, avec un système de recherche d’une à cinq étoiles pour augmenter la résistance des forces adverses en ajoutant notamment de nouveaux ennemis. Autant vous dire que les combats étant la partie la moins réussie du titre, avec des enchaînements assez fades et répétitifs marqués en plus par une caméra parfois aux fraises et une gestion manuelle de cette dernière moyennement efficace, vous aurez vite fait d’aller à la planque pour faire baisser la recherche ou de trouver des toilettes pour échapper aux forces de l’ordre… Sauf quand ce sont des combats de boss. Attention toutefois aux menottes téléguidées, vous allez enchaîner les attaques et pousser le boost jusqu’à en perdre la tête (sans mauvais jeu de mots).
En revanche, en dehors des combats, le gameplay est excellent et solide. Les connexions pour les grinds et les wallruns se font généralement bien (un peu moins sur certains rails plus aériens, la faute à quelques imprécisions dans les sauts), on gagne bien en vitesse, on peut assurer des manual pour prolonger les combos et on a même un système de boost pour gagner en vitesse ou faire un dash aérien afin d’aller wallrun un élément plus loin ou rejoindre un rail qu’on ne peut pas atteindre autrement. Les touches A, X et Y servent également à faire des figures, on peut passer du mode à pied au mode en skate (rollers ou BMX) avec une gâchette et on peut même faire quelques glissades. Le tout s’enchaîne très bien et est vraiment fun à jouer. Bien entendu, il y a également le système de bombes de peinture, pour en foutre sur les ennemis ou pour coller son graffiti sur les endroits prévus à cet effet. Il y a une gestion de quatre tailles, en sachant que les graffitis de taille S sont finis instantanément, tandis que ceux de tailles supérieures demandent d’accéder à un mini-jeu avec le stick demandant de relier des points. Selon la combinaison choisie, on exécute le graffiti souhaité. Il est donc plus qu’intéressant de favoriser les défis et de débloquer de nouveaux graffitis en les récupérant ensuite dans l’environnement pour agrémenter sa liste (consultable via le téléphone pour apprendre les combinaisons des dessins qui nous plaisent le plus). Le système est bien fait, c’est efficace.
Dans les petits plus, il est également possible de se déplacer en skate (que l’on peut personnaliser) ou en rollers ou en BMX. A une petite particularité près, le moyen de locomotion ne modifie pas le gameplay. On exécute donc les mêmes commandes pour faire la même chose. De même, le gameplay étant très arcade, on ne ressent pas la différence de poids des trois éléments. Dommage, il y avait peut-être une idée à creuser un peu plus. Enfin, précisons qu’il faut un poil plus de neuf heures pour venir à bout de l’aventure en allant à l’essentiel mais que vous pouvez aisément rajouter quelques heures au compteur si vous poussez l’exploration, ce que le titre vous encourage à faire, sans parler du fait de faire quelques photos (avec un système moins évident que ce dont on a l’habitude) ou de jouer au mini-jeu de son téléphone.
Avec les moyens du bord, Team Reptile a réussi l’exploit de proposer un Bomb Rush Cyberfunk qui reprend parfaitement la formule de Jet Set Radio. Certes, tout n’est pas parfait, il y a encore des points à améliorer comme en témoignent les points négatifs relevés, mais la formule fonctionne, c’est fun et on prend un sacré plaisir à progresser, à suivre l’histoire et à faire des graffitis à tout va, sans parler des enchaînements pour tenter le meilleur score possible. Certes, certain(e)s pourraient lâcher la manette aux alentours de la moitié du jeu, la faute à quelques imprécisions, à une structure de progression qui se répète, à quelques défis assez corsés ou encore à une police qui finit par nous gonfler plus qu’autre chose… Mais celles et ceux qui ne perdront pas le rythme prendront simplement du plaisir, peut-être un poil boosté par de la nostalgie. Dans tous les cas, il faut reconnaître que le jeu est très bon et qu’en passant outre les quelques petites faiblesses, on se retrouve avec un digne successeur à la licence Jet Set Radio. Changer de personnage, danser, faire du skate, du roller ou du BMX, graffer avec un système efficace pour appliquer le graffiti que l’on souhaite, écouter du bon son et relever des défis qui mettent à l’épreuve sa dextérité sont tout autant d’éléments qui procurent un plaisir non négligeable.
Les +
- Une histoire agréable à suivre
- Un gameplay fluide et dynamique
- Grâce aux dash et manual
- Encourage l’exploration
- Graffitis vraiment jolis
- Défis plutôt variés et assez didactiques
- Les niveaux des rêves
- Quelques éléments à débloquer
- Environnements variés
- Durée de vie honnête (9h en allant à l’essentiel)
- Le menu via le téléphone portable à clapet
- Une très bonne bande-son
- Skate, Rollers et BMX…
Les –
- … Mais ça ne change pas grand-chose côté gameplay
- Chargements longuets
- Une structure de progression qui se répète
- La console qui crashe deux fois sans raison
- Quelques loupés parfois (sauts/connexions pour les grinds/wallruns)
- Combats assez fades et répétitifs
Test rédigé par Vincent – Lageekroom