TEST : Death Stranding, une expérience unique et paradoxale
Voilà, nous sommes venus à bout de Death Stranding ! En 35h, et quasi en ligne droite, nous avons parcouru les immenses décors du jeu d’Hideo Kojima dans le but de recréer l’Amérique. Annoncé à l’E3 2016 avec le retour en fanfare de Kojima, après l’annulation de Silent Hills (dont on ne se remet toujours pas), le jeu était très attendu chez nous et toujours aussi mystérieux, malgré une communication grandissante et des vidéos de présentation assez longues. Nous avons terminé l’aventure, et il est temps de vous donner notre avis !
Revenons quelques instants sur l’histoire de Death Stranding, que vous connaissez sans doute déjà tous. Notre personnage, Sam Porter Bridges, prend place dans un monde post-apocalyptique, dans lequel l’humanité se planque dans des bunkers suite au Death Stranding, un phénomène que l’on va découvrir au fur et à mesure de l’avancée dans le jeu. Sam est donc un transporteur, chargé de trimbaler de la marchandise plus ou moins importante d’une ville à une autre, afin de reconnecter les humains. La société est décimée, éclatée, et votre rôle sera de relier la côte Est à la côte Ouest. Il est difficile de rentrer davantage dans les détails sans spoiler, mais sachez que Kojima parvient à mettre en place un univers créé de toute pièce, et vous allez apprendre ce que sont la « grève » ou encore le « réseau chiral ». Le monde n’est en tout cas plus ce qu’il était, et la vie a disparu de la surface. La faune est inexistante, tandis que la flore a bien du mal à se développer, la faute à une pluie qui détruit tout, jusqu’à faire vieillir la peau humaine en accéléré. Pire, le monde des morts se mélange avec celui des vivants, et les zones pluvieuses seront squattées par les « échoués », sortes de revenants particulièrement flippants et faisant tout pour attraper notre bon vieux Sam. Celui-ci possède heureusement un pouvoir permettant de les ressentir, et trimbalera quasi toute l’aventure « BB », petit être rapidement attachant conservé dans une capsule reliée à Sam. Quand on vous dit que l’univers de Kojima est unique, on exagère à peine !
Sam sera donc le lien entre les villes, et un symbole pour l’avenir du pays. Le gros du gameplay est donc, vous le savez, de transporter de la marchandise d’un point A à un point B, ce qui a permis aux amateurs de réseaux sociaux de découvrir les nombreux trolls liés au jeu, le présentant comme un « Chronopost Simulator ». C’est en effet ce que l’on peut penser en ne jouant qu’aux premier chapitres du jeu, car Death Stranding est bien plus que ça. En plus de ces cinématiques sublimes (mise en scène impeccable, casting de fou, dialogues bien écrits), Death Stranding monte en puissance de chapitre en chapitre (il y en a 15) pour pleinement s’exprimer lors de ses 5 dernières heures. Il faut avouer que le début du jeu a de quoi refroidir, et l’abandon est parfois proche. Pénible, frustrant, énervant, chiant, mou : tels sont les adjectifs que nous avons employés durant les premiers chapitres de Death Stranding. Mais on s’accroche, car les récompenses sont gratifiantes, et vont d’un nouvel équipement (bottes, exosquelette, nouvelles armes) à une cinématique que l’on attend avec impatience. Aller d’un point A à un point B n’est pas de tout repos, entre les mules qui cherchent à tout prix à voler votre marchandise, les échoués qui vous traquent, et Sam lui-même, qui passe son temps à trébucher et se casser la tronche. Traverser une rivière ne vous aura jamais semblé aussi difficile, tout comme escalader un rocher. Normal, étant donné que Sam transporte plusieurs dizaines de kilos de marchandise à chaque voyage. On pourra utiliser des véhicules pour aller plus vite, mais leur conduite est pénible et les bugs de collision permanents. On pensera tout particulièrement à la moto, plus énervante qu’autre chose. Alors certes, on pourra construire des routes, mais à quel prix ? Dans le même ordre d’idée, des échelles ou autres cordes devront êtres emmenées pour atteindre certaines zones. Bien préparer son expédition est une chose capitale dans Death Stranding. On ne reviendra pas sur toutes les mécaniques de jeu (recyclage d’objets, créations diverses), préférant vous en laisser la découverte.
Si Kojima a voulu en faire baver aux joueurs et leur faire ressentir la solitude, c’est réussi. Bordel, que le jeu est exigeant ! Traverser une montagne en pleine tempête durant une bonne heure va vous faire suer des pouces, et il ne manque plus que vous vous cassiez la tronche par terre pour ajouter un peu de piment. Pire, les marchandises peuvent être détruites ou endommagées par la chute et même par la pluie. Résultat : il faudra retourner au point de départ. C’est en cela que le jeu est un immense paradoxe : Death Stranding est un jeu pénible et souvent saoulant, mais on s’y accroche, et on y retourne dès que l’on peut ! La découverte du monde et des différentes zones et intéressante, et le background se dévoile petit à petit. On ne comprend bien souvent pas grand chose à ce qu’il se passe, mais rassurez-vous, tout se décante durant les 2 dernières heures. Sam va donc découvrir le monde, la grève, et se retrouver plongé dans des séquences pour le moins perturbantes, notamment en pleine guerre mondiale. Mais chut, on vous laisse découvrir tout ceci également. Le sentiment d’immensité est réellement impressionnant et réussi : il suffit de marcher quelques dizaines de minutes et de se retourner pour se rendre compte de la distance parcourue, et tout ceci est assez vertigineux. Le jeu proposera quelques séquences davantage orientée action, mais pas forcément adaptée et manquant de punch. Il faudra également gérer « BB », qui a tendance à pleurer en cas de chute. Il faudra le bercer pour le calmer, et sa présence sera bien souvent réconfortante et bien entendu capitale pour progresser.
Si Death Stranding vous apprend à gérer la solitude et l’isolement, d’autres joueurs pourront participer à votre aventure. En effet, le jeu propose une dimension sociale réussie, et il sera possible de profiter des installations des autres joueurs (routes, ponts, zones de stockage d’objets). L’homme va petit à petit reprendre la main sur la nature, se lier et s’entraider. Rien ne sera demandé en échange, mis à part un petit like. Aider sans rien demander en retour fait du bien, et la solidarité sera de mise, notamment pour prévenir si une zone est dangereuse ou motiver les troupes. Si en revanche vous souhaitez en baver en solo, il sera possible de tout désactiver ! On pourrait parler des heures de Death Stranding et sur ses nombreux détails, les gâchettes à utiliser pour se stabiliser, le fait de devoir se laver et pisser, l’infiltration un peu ratée, les grenades à fabriquer à partir de vos excréments, les menus inutilement complexes et parfois illisibles, le casting varié et réussi, la grève et ses mystères, les plans graphiquement incroyables et purement cinématographiques… Mais c’est notre ressenti que nous allons développer dans le paragraphe suivant. Ah oui, nous avons failli oublier : la bande son est sublime !
Death Stranding est un jeu accrocheur. Ses graphismes de haute volée donnent envie d’avancer, mais la pénibilité de certains passages en découragera plus d’un ! Oui, nous avons souvent ragé lors de notre périple, notamment lorsque notre camion chutait dans un canyon et se retrouvait coincé, ou quand Sam avait du mal à garder l’équilibre… Le level design est compliqué à appréhender, et les nombreux débris réellement handicapants. Nous avons employé à de nombreuses reprises le mot pénible, et soupiré devant toutes ces missions longues et identiques. Alors pourquoi est-ce que notre impression finale, au générique de fin, s’avère excellente ? Les mauvaises langues diront que le simple de nom de Kojima à la réalisation d’un jeu permet à celui-ci d’atteindre le statut de culte. Et bien non ! Et pour tout vous dire, nous aimons beaucoup la saga Metal Gear mais ne vouons aucunement un culte à Kojima. Ce qui passionne dans Death Stranding, c’est cette solitude à la fois flippante et apaisante, et le scénario du jeu qui se dévoile petit à petit. Les métaphores sont nombreuses, sur la vie ou la mort, les réseaux sociaux, les relations humaines, le pouvoir, le patriotisme ou encore la famille. Le jeu propose également de nombreux éléments visuels tirés de romans ou même de la religion, et les échoués en sont le parfait exemple. Et lorsque l’histoire monte en puissance durant les dernières heures, on ne peut qu’être happé par tant de maîtrise technique. L’évolution de Sam est également très importante, lui qui a bien du mal à côtoyer ses semblables mais qui finit par s’en rapprocher, même physiquement. On regrettera par contre un côté un peu cliché de certains personnages, et les innombrables textes et indications inutiles qui vous expliquent 15 fois comment faire telle ou telle action. C’est inutilement complexe et pénible, et beaucoup trop bavard.
Death Stranding est un pur paradoxe. Oublions le fait que ce soit Kojima à la tête du projet, ce qui ne change absolument rien de notre côté. Le jeu est long, pénible, énervant, frustrant et inutilement complexe, mais s’avère addictif. Difficile de poser la manette une fois lancé, et on se surprend souvent à dire « allez, encore une dernière livraison et j’arrête » ! La mise en scène est incroyable, le jeu est sublime, et les récompenses ultra gratifiantes. On sait pertinemment que Death Stranding laissera de nombreux joueurs sur le carreau, et il faut du courage pour passer un chapitre 3 ultra long et pénible. Mais en s’accrochant, on découvre une histoire bien écrite, un casting superbe (Léa Seydoux, Norman Reedus, Mads Mikkelsen) et des séquences impressionnantes. Qu’est-ce que le Death Stranding ? Comment l’arrêter ? Notre mission a t’elle réellement un sens ? A vous de le découvrir !
Les +
- un univers unique et incroyablement travaillé
- casting de fou
- la mise en scène !
- bande son envoûtante
- la solitude parfaitement retranscrite
- le multi qui s’intègre parfaitement bien au solo
- excellente durée de vie
- gameplay riche qui gagne en variété d’heure en heure
- possibilité de faire des constructions
- des effets de lumière superbes, tout comme certaines textures
- les échoués et leur symbolique
- le BB, attachant
- bourré de métaphores intelligentes
- VF de très bonne qualité
- le scénario qui explose dans les dernières heures
- le design des boss, superbe
Les –
- souvent pénible, frustrant, trop long
- on a beaucoup ragé !
- toutes les missions se ressemblent
- des bugs de collision à gogo
- la conduite des véhicules
- le chapitre 3, incroyablement long et chiant
- les muses à l’IA franchement limitée
- les phases d’action, moyennes
- menus minuscules et trop complexes
- des boss beaucoup trop faciles
Lageekroom