Avis BD Glénat : Les travailleurs de la mer (récit complet)
« Les travailleurs de la mer » fait partie des lancements forts de son éditeur Glénat pour cette dernière partie de l’année 2024. Réalisé par Michel Durand, l’ouvrage est massif, impressionne même, et propose une lecture inédite du roman de Victor Hugo paru en 1866. Un roman qui nous parle de la relation de l’homme avec la nature, mais également avec ses semblables, une puissante épopée écrite par Victor Hugo à Hauteville House durant son exil sur l’île de Guernesey, qu’on découvre (ou redécouvre) ici dans un style visuel d’une rare puissance. C’est parti pour notre avis.
Synopsis : Propriétaire de La Durande, un bateau qui vient de faire naufrage, Mess Lethierry est fou de rage à l’idée de perdre le moteur révolutionnaire de son steamer… Prêt à tout pour récupérer le moteur qui lui donnait gloire et richesse, il promet la main de sa nièce Déruchette à celui qui récupérera la machine ! Mais quelle âme risquerait de s’aventurer entre les deux rochers de l’écueil Douvres ? Gilliat, un pêcheur amoureux de Déruchette, accepte le défi ! Aussi robuste que rêveur, il va braver les flots et affronter la colère de l’océan au large de Guernesey.
Comme nous le disions dans notre introduction, « Les travailleurs de la mer » est un ouvrage qui impressionne, aussi bien par sa finition (jaquette superbe et aux effets de relief ou de grain saisissants) que par son style visuel. Michel Durand propose des dessins entièrement réalisés en hachure (« traits parallèles ou croisés qui figurent les ombres, les reliefs d’un dessin, d’une gravure »), qui bénéficient de la grande taille de l’ouvrage ! On en prend plein les yeux, parfois même trop, tant les détails sont nombreux et la mise en scène maîtrisée. Après avoir terminé la lecture, on a presque les yeux qui piquent tant l’ensemble se veut généreux, grandiose, et clairement impressionnant. Un style visuel qu’on ne voit que trop rarement, et qui nous plaît énormément, mais nous avons conscience qu’il ne plaira pas forcément à tout le monde. On ne peut quoi qu’il en soit que saluer la prise de risque, et le rendu final est saisissant (certaines doubles pages sont à couper le souffle). Des décors aux personnages, en passant par la représentation des créatures marines ou la mer qui se déchaîne, on en prend plein les yeux.
La mer est au cœur du récit, puissante et imprévisible, et elle va en faire voir de toutes les couleurs à Gilliatt, héros tragique de ce récit, un homme aux capacités physiques impressionnantes mais vivant en marge de la société. Une promesse de mariage avec la jeune Déruchette le pousse à partir à l’aventure, dans une quête touchante mais dont on se doute de l’issue. Les personnages sont parfaitement développés, le récit alternant entre dialogues et explications via le narrateur, avec cette envie de contempler chaque scène en détail. Oui, on passe de longues minutes à décortiquer chaque lieu, chaque visage, chaque arrière-plan, pris dans un récit qui parvient presque à nous perdre tant on est happé par les visuels. Cela ne nous empêche pas d’en ressentir la portée et d’en comprendre les thèmes principaux. S’il ne plaira pas à tout le monde, « Les travailleurs de la mer » est un ouvrage puissant et immersif, et on ne peut que féliciter la prise de risque, aussi bien visuelle que narrative. Un sacré tour de force tout de même.
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