Avis BD Glénat : Les Yeux Doux (récit complet)
C’est avec un peu de retard que nous abordons notre ouvrage du jour intitulé « Les Yeux Doux », puisqu’il est disponible aux éditions Glénat depuis le 28 août 2024. Mais nous ne pouvions pas passer à côté de cette bande-dessinée signée Eric Corbeyran (au scénario) et Michel Colline (au dessin), tant les thèmes qu’elle aborde sont d’actualité ! C’est parti pour notre avis !
Synopsis : Dans un monde dystopique où les usines crachent leur épaisse fumée, les pin-up des « Yeux Doux » veillent… Aucun délit n’échappe à leurs regards langoureux et menaçants depuis qu’une compagnie de surveillance a choisi ces femmes comme logo ! Au milieu des affiches de propagande, Anatole est rivé devant les écrans de surveillance. Employé modèle, sa vie bascule le jour où il repère une jeune voleuse qu’il dénonce sur-le-champ ! Mais pas un jour ne passe sans qu’il ne repense au joli visage de cette inconnue. Car Anatole vient, sans doute pour la première fois, de tomber amoureux ! Il se lance alors à la recherche d’Annabelle, déroge aux règlements et s’embarque dans une folle aventure qui va le mener à rejoindre un réseau de rebelles.
Le titre de notre bande-dessinée du jour dénote clairement avec son ambiance ! En effet, le monde dystopique (pas si éloigné du nôtre, vous allez le comprendre) que nous découvrons dans « Les Yeux Doux », est assez sombre, et rappelle des films comme Brazil, ou dans un tout autre style Demolition Man, avec sa société ultra stricte et ses habitants qui se réfugient sous terre pour échapper à cette dictature. Dans le monde de « Les Yeux Doux », mélangeant modernité et années 50 (on pourrait presque parler d’un style rétro-futuriste), il faut suivre les règles, travailler, consommer. Le moindre vol vous conduit en prison, tandis que la perte de votre emploi (aussi médiocre soit-il) vous rend littéralement invisible aux yeux de la société. La métaphore est puissante, tout comme la plupart des thèmes abordés dans l’ouvrage, qui font sévèrement écho avec notre société actuelle. Sans emploi, pas d’argent, sans argent, pas de logement, et c’est ce qui arrive à Arsène et sa petite sœur Annabelle. Des personnages immédiatement attachants, qui se retrouvent donc à la rue mais qui vont rapidement entrer en contact avec le jardin des bennes (on apprécie le jeu de mot), une société parallèle qui se met en place grâce à un réseau rebelle. Le récit nous dévoile également le destin d’Anatole, un employé modèle (déjà élu 5 fois employé du mois avec pour récompense un simple stylo) qui est chargé de scruter ses caméras pour attraper les voleurs. C’est Annabelle qui en fait les frais, et qui se retrouve enfermée pour le vol d’un simple fruit. Mais Anatole va la faire innocenter en supprimant la vidéo, et finir, lui aussi, licencié. Le destin ne va pas tarder à rassembler nos personnages.
Des personnages, il y en a beaucoup d’autres dans notre histoire, et toutes et tous parviennent à nous toucher. Si la société qui nous est décrite nous parle, c’est parce qu’on en est pas loin. La critique est cinglante, et même si le thème a déjà été abordé de nombreuses fois, ça fonctionne très bien ici. Les immenses pancartes de pin-up aux yeux doux qui arborent la ville cachent en réalité des caméras, et on est licencié et jeté comme un malpropre à la moindre erreur. Le souci du détail est permanent tout au long de la lecture, dans les dialogues, les noms des personnages, mais également les visuels. C’est sublime et bourré de détails, avec des plans impressionnants de la ville et des personnages très expressifs. C’est souvent tragique, parfois poétique, avec une touche d’espoir qui nous fait croire en un futur meilleur, porté par l’amour des uns envers les autres. Néanmoins, la fin est à nos yeux un peu rapide, même si un dernier message fort nous est envoyé en pleine figure, avec un rebondissement très inattendu ! Nous ne vous en dirons pas plus pour ne rien vous gâcher, mais cette fin fait clairement réfléchir. « Les Yeux Doux » parvient donc à porter des thèmes importants, le tout dans une ambiance très réussie et ultra immersive. C’est parfois classique, mais terriblement efficace.
Lageekroom