Avis BD Glénat : Tsar Bomba – Les paradoxes d’Andreï Sakharov
Signée Fabien Grolleau (au scénario) et Cyril Elophe (au dessin), la bande dessinée « Tsar Bomba – Les paradoxes d’Andreï Sakharov » est disponible aux éditions Glénat depuis le 14 mai 2025. Au programme : une plongée au cœur de l’URSS de la guerre froide, dans l’intimité tourmentée d’un homme que l’Histoire a marqué à jamais. Peut-on être à la fois architecte de l’arme nucléaire la plus puissante jamais conçue et un défenseur ardent des droits de l’homme ? C’est ce que nous allons voir !
Synopsis : Andreï Sakharov grandit dans une famille de scientifiques qui échappe aux purges staliniennes. Fasciné très tôt par le rapport à l’infini, son génie est vite repéré par le Kremlin. Dès la fin de la Seconde Guerre mondiale, ce cerveau brillant travaille au développement d’armes nucléaires pour la Russie communiste. Sa vie bascule quand, horrifié, il découvre la puissance de la bombe qui frappe Hiroshima en août 1945. Après cette démonstration, Staline n’a qu’un objectif : doter l’URSS de la bombe nucléaire ! Et sa volonté ne tolère aucune opposition. Andreï est envoyé dans une base scientifique secrète, avec pour unique mission de faire avancer la recherche avec ses collègues physiciens. Mais l’homme de science cauchemarde, trop conscient de l’objet monstrueux de ses travaux. Découvrez l’ouvrage sur le site de l’éditeur, à cette adresse.
« Tsar Bomba – Les paradoxes d’Andreï Sakharov » est un ouvrage historique mais également profondément humain. Le mot paradoxe trouve ici tout son sens, puisqu’Andreï Sakharov, brillant homme de science, souhaite utiliser l’énergie nucléaire à des fins humanistes. Lorsqu’Andreï Sakharov nous parle « d’équilibre de la terreur » ou encore de « dissuasion nucléaire », il espère au fond de lui que l’armement thermonucléaire serve à empêcher les guerres et non à les provoquer. La course à l’armement, à la puissance, que l’on vit plus que jamais de nos jours, aurait dû avoir pour but de dissuader toute attaque, et que chacun reste sagement dans son coin. Malheureusement, c’est l’inverse qui se produit, et celui qui est à l’origine du premier essai concluant d’une bombe H et qui sera poussé par son pays pour travailler sur le sujet jusqu’à être envoyé dans une installation secrète va rapidement se rendre compte du poids de ses actions. Une dualité qui est le cœur du récit et qui nous est parfaitement expliquée et représentée, à travers le parcours de cet homme, ses choix et ses convictions. Entre moments de tension scientifique (et politique) et séquences plus intimistes et familiales, parfois via des allers-retours entre le passé et le présent, l’ouvrage s’éloigne du simple biopic pour proposer quelque chose de plus dynamique.
Andreï Sakharov, « père de la bombe à hydrogène soviétique, mais aussi fervent défenseur des droits de l’homme et prix Nobel de la paix en 1975″, est un personnage tiraillé, et nous avec. Le côté historique de l’ouvrage est intéressant, mais c’est surtout le personnage d’Andreï Sakharov qui nous passionne. Entre sa passion pour la science et la volonté de la faire avancer, et ce que veulent en faire les dirigeants, l’homme a de lourdes responsabilités sur ses épaules et des convictions fortes, quitte à déranger les autorités. On pourrait presque dire qu’une grande connaissance implique de grandes responsabilités… Visuellement, Cyril Elophe alterne les séquences contemplatives avec d’autres beaucoup plus intenses. Et si les visages semblent simplistes au premier abord, ils s’avèrent étonnamment expressifs. Les couleurs oscillent essentiellement sur des tons marron et sépia, renforçant l’atmosphère poussiéreuse de l’URSS stalinienne. Une grisaille permanente, qui accentue l’ambiance lourde voire étouffante du récit. Un choix osé et qui fonctionne bien, mais il faut savoir à quoi s’attendre. L’ouvrage se termine sur une interview très intéressante des auteurs et sur quelques croquis, histoire de compléter un ensemble déjà bien riche.
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