TEST : Deliver Us Mars, une suite plus ambitieuse mais trop imparfaite
S’il a eu besoin de quelques mises à jour pour proposer une aventure totalement convaincante, Deliver Us the Moon s’est avéré à nos yeux une excellente surprise. Un jeu intelligent, mystérieux, qui réussissait à proposer une immersion excellente et des séquences impressionnantes malgré un manque certain de budget. Sorti récemment en version new-gen (nous avons rejoué au titre sur PS5), le titre de KeokeN Interactive a connu un joli succès, et bénéficie d’une suite assez attendue de notre côté. Avec des ambitions plus grandes et une narration plus développée, le titre est enfin disponible et nous avons eu la chance de nous rendre sur Mars avec une version PS5 envoyée par l’éditeur. C’est parti pour notre avis !
Nous attentions Deliver Us Mars avec une certaine impatience mais également quelques craintes, la faute à des séquences de gameplay par forcément convaincantes (diffusées dans les trailers du jeu), notamment en termes d’animation. Pour tout vous dire, nous pensions même que le jeu allait être repoussé. Et bien que nenni, et le titre de KeokeN Interactive est désormais disponible sur consoles Xbox, consoles PlayStation et sur PC depuis le 2 février 2023 pour une trentaine d’euros.
« Qu’essayons nous de sauver si c’est pour le détruire nous-même ? »
A l’image de son prédécesseur, Deliver Us Mars a de chouettes atouts à faire valoir ! On retrouve dans ce nouvel opus un mélange d’énigmes, d’exploration et de moments chocs ! Certes, certaines séquences ont déjà été jouées dans Deliver Us the Moon et sont forcément moins impressionnantes ici, comme le décollage de la fusée, mais les premiers chapitres restent vraiment bons, et nous proposent ce que l’on aime dans un récit de science-fiction : de la tension, des scènes qui nous font retenir notre souffle, et la découverte d’une planète lointaine. Des premiers chapitres qui sont clairement les meilleurs du jeu, et qui bénéficient qui plus est d’une excellente mise en scène, le tout accompagné d’une VF de bonne facture et de superbes musiques. Mention spéciale également au sound design, très travaillé. Il n’y a pas à dire, l’immersion est immédiatement au rendez-vous, malgré quelques bugs de collision ou imprécisions de gameplay. Des premiers couacs certes pardonnables, mais qui vont rapidement nous faire comprendre que le jeu avait peut-être un peu trop d’ambition.
Le trop plein d’ambition des développeurs (ils sont une vingtaine seulement dans l’équipe) se heurte en effet au budget du studio, et Deliver Us Mars souffre de la comparaison avec son prédécesseur. Faire un jeu davantage narratif et avec plus de personnages, c’est bien, mais proposer des visages de qualité, c’est mieux. Les différents faciès sont clairement inégaux, parfois convenables mais souvent sans âme voire même gênants… On ne parvient pas à ressentir les émotions des personnages (ils ne bougent parfois pas les lèvres, n’ont pas d’expression alors qu’ils pleurent), ce qui est franchement dommage car l’écriture est de qualité. Le pire étant les personnages masculins, mal proportionnés, qui semblent sortir d’un jeu Kinect. La mise en scène, percutante à de nombreuses reprises comme nous le disions précédemment, souffre également de « coupures » et de transitions qui cassent l’immersion (par exemple, après l’arrêt d’un véhicule, notre personnage se retrouve téléporté, debout et à quelques mètres de l’engin). On dirait même que certaines séquences sont manquantes, et on ne comprend parfois pas bien pourquoi on se retrouve à tel endroit. Pire, les flashbacks censés nous faire comprendre les tenants et aboutissants de l’histoire cassent le rythme des événements du présent. C’est vraiment dommage, est tous ces défauts ont tendance à sortir d’un récit qui aborde néanmoins des thèmes importants liés à l’humanité, son avenir, mais surtout son égoïsme.
Côté gameplay, on retrouve donc de l’exploration (avec même quelques déplacements en véhicule) dans des décors extérieurs très jolis, et des intérieurs qui réservent quelques énigmes. Votre petit robot de compagnie n’est malheureusement quasi plus exploité dans cette suite (à part pour décrypter des hologrammes via un mini-jeu vite relou), qui va baser les 3/4 de ses énigmes sur des faisceaux d’énergie à orienter voire scinder pour ouvrir des portes verrouillées. C’est sympathique, mais pas forcément logique en termes de level design, et on ne retrouve pas l’intelligence de certaines énigmes du premier jeu. Tout semble plus basique, plus facile, même si certaines phases de plateforme vont très certainement vous agacer. Et les séquences de grimpette, parlons-en. Sur le papier, l’idée n’est pas mauvaise, mais la prise en main est délicate, parfois imprécise, et ces passages sont trop longs. C’est symptomatique du jeu en général : il y a de bonnes idées, mais elles sont mal mises en œuvre. Même le sentiment de solitude de Deliver Us the Moon a disparu, car on évolue désormais, au moins durant la moitié du jeu, avec des compagnons. On notera que le jeu contient un prologue, 9 chapitres et un épilogue, et qu’on pourra le boucler en environ 6 heures (avec 52% des trophées débloqués lors de notre première partie), sachant que l’on n’atteint la planète Mars qu’après environ 2 heures.
Techniquement, le jeu souffle le chaud et le froid. Du côté des points positifs, on pourra mettre en avant certains panoramas vraiment superbes, des couleurs bien choisies, et un frame rate en 60 images par seconde en intérieur. Les séquences dans l’espace parviennent à couper le souffle, et Mars a des décors assez impressionnants. En extérieur, c’est par contre un peu plus compliqué en termes de fluidité et il y a malheureusement quelques ralentissements et du clipping. Le jeu souffre également de pas mal de bugs de collision, d’animations ratées (jambes de l’héroïne, mouvements robotiques lors de la grimpette) et d’imprécisions lors des sauts ou de l’escalade. On peste parfois contre le jeu, qui manque de finition (à l’image de Deliver Us the Moon à ses débuts, et qui a su monter en qualité après plusieurs mises à jour). Même en gardant en tête que le budget du studio n’est pas celui d’un AAA, on ne peut s’empêcher de rester sur notre faim, et on passe trop souvent du coq à l’âne, et d’une séquence superbe et cinématographique à une autre ratée.
Ambitieux, les développeurs de Deliver Us Mars ont souhaité proposer, avec cette suite, un récit plus dense et une narration encore plus cinématographique. Le résultat est toujours aussi immersif, réalisé avec passion, mais moins malin que l’opus précédent et surtout en deçà de nos attentes techniquement. Certains paysages sont très beaux, on retrouve des séquences qui coupent le souffle, mais le manque de budget se fait souvent sentir, avec par exemple des visages ratés, des animations rigides, et des passages de grimpette dispensables. Pas mal de bonnes idées tombent à l’eau au final, et les énigmes sont elles aussi répétitives et manquent d’inventivité. Les développeurs ont voulu raconter une histoire (bien écrite et avec quelques rebondissements) mais ont perdu de vue ce qui faisait l’essence du précédent titre : son mystère et son ambiance anxiogène. Nous avons passé un bon moment malgré tout, mais nous restons sur notre faim, et Deliver Us the Moon reste un net cran au dessus de cette suite.
Les +
- les premiers chapitres dans l’espace, ultra immersifs
- certaines séquences bien stressantes et qui coupent le souffle
- mise en scène cinématographique, avec quelques chouettes plans et mouvements de caméra
- certains panoramas font vraiment plaisir
- VF de bonne facture
- des musiques superbes
- sound design excellent, qui sait faire monter la pression
- quelques énigmes intéressantes…
Les –
- … mais la plupart restent basiques
- les flashbacks, qui cassent le rythme
- les visages, peu expressifs et parfois gênants…
- des couacs de mise en scène, avec des transitions mal gérées ou manquantes
- des soucis techniques (animations, chutes de frame rate)
- phases d’escalade et de plateforme pénibles
- le sentiment de solitude a quasi disparu
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