Avis Ki-oon : Sweet Home – Tomes 3 et 4
Le terrifiant huit-clos « Sweet Home » a fait son retour aux éditions Ki-oon avec un tome 3 disponible depuis le 6 octobre 2022. Le duo Carnby Kim (au scénario) et Youngchan Hwang (au dessin), à qui l’on doit l’excellent « Bâtard« , nous embarque dans un récit tout aussi sombre mais dans un genre bien différent. Les monstres envahissent la ville, et Hyeon-Su assiste à l’effondrement de la civilisation depuis son petit appartement. Lui qui a toujours préféré vivre reclus chez lui ne va pas avoir d’autre choix que de sortir pour trouver de la nourriture. Les ennuis ne font que commencer…
– Mise à jour de l’article avec notre avis sur le tome 4, disponible le 19 janvier 2023 –
Synopsis : Sans famille, sans amis, sans espoir… un reclus peut-il survivre à l’apocalypse ? Depuis son écran, Hyeon-Su assiste à l’effondrement de la civilisation et à l’avènement des monstres jusqu’aux plus hautes sphères de l’État ! Mais pour lui, au fond, ça ne change rien… Le monde est tout aussi effrayant qu’avant et le mieux est encore de rester cloîtré. Seulement voilà, la nourriture commence à manquer. L’adolescent se risque alors à mettre le nez hors de son appartement… et se retrouve face à une créature cauchemardesque dont la tête est à moitié coupée ! À présent qu’elle a pénétré chez lui, le jeune homme parviendra-t-il à lui échapper ?
Le gros point fort de « Sweet Home » est incontestablement son ambiance, aussi poisseuse que claustrophobique. Notre héros Hyeon-Su n’a pas d’autre choix que de sortir de son appartement pour chercher de la nourriture. Mais le jeune homme est infecté, et commence à souffrir de différents symptômes. Saignements et voix dans sa tête le consument à petit feux, mais il lutte et tente de garder ses esprits, notamment pour aider 2 enfants à survivre. D’autres personnages vont intégrer le récit, résidant eux aussi dans l’immeuble et tentant de survivre aux monstres qui les attaquent. Le bestiaire est toujours aussi réussi, du monstre sans tête qui ne repère que les sons à celui bien plus imposant qui prononce machinalement des mots tels que muscles, force ou protéines. La métamorphose d’humains en monstres viendrait-elle des désirs refoulés des personnes atteintes ? Le journal de 20h étant toujours diffusé au quotidien, on assiste à ce genre de théorie via des interviews et des débats houleux. Certains pensent qu’il s’agit d’une évolution naturelle qui vise à réguler le nombre d’humains sur Terre, d’autres qu’internet a servi de défouloir mais que cela ne suffit plus, et les religieux restent fidèles à eux-mêmes. On en apprend quoi qu’il en soit un peu plus sur le contexte via ces journaux télévisés, qui s’intègrent entre les différents événements.
Ce tome 3 est vraiment réussi, avec un récit mieux développé que dans le volume précédent. Les personnages ont tous leur caractère (on en apprend souvent sur leur passé), et vont devoir cohabiter. Chacun y va de son moment de bravoure, les tensions sont bien présentes (avec notre héros infecté qui inquiète forcément ses nouveaux compagnons), et on assiste à certaines séquences choc (la femme avec le bébé). Mieux encore, on découvre un affrontement entre 2 monstres. L’ensemble est dynamique, bien mis en scène (malgré quelques pages un peu vides liées au format d’origine), et l’ambiance est toujours aussi sombre. Le style visuel de Youngchan Hwang nous plait toujours autant, avec des cases franchement classes, certaines faisant vraiment froid dans le dos. Après un tome 2 un peu timide, « Sweet Home » monte en puissance, ce qui n’est pas pour nous déplaire !
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Sweet Home – Tome 4 : Hyeon-Su, aidé de quelques voisins, est parvenu à sauver les enfants d’une mort certaine. Après s’être débarrassés du monstre géant, lui et ses compagnons décident de se réfugier dans l’appartement 1408 où vit Du-Shik Han, l’expert en bricolage, afin de se reposer et de réfléchir à un plan… Pendant ce temps, les habitants qui s’étaient regroupés dans le hall d’entrée ont monté une équipe pour explorer l’immeuble, dans le but de trouver des vivres et d’éventuels survivants. Mais alors que Sang-Wook et Eun-Yu s’apprêtent à barricader le quatrième étage, leurs voix attirent l’attention de la créature aveugle… qui se propulse jusqu’à eux ! Arriveront-ils à la tuer alors qu’ils ne sont que deux ?
Hyeon-Su et ses nouveaux compagnons ne sont pas seuls dans l’immeuble, et le tome 4 de « Sweet Home » démarre avec un affrontement entre un monstre et une autre équipe de survivants. Ces derniers sont regroupés dans le hall d’entrée, et ce nouveau volume va être l’occasion de découvrir de nouveaux personnages aux caractères bien différents. « Sweet Home » est une série à l’ambiance très réussie, mais au rythme un peu inégal. Certains chapitres sont dynamiques et intenses, avec un côté horrifique bien maîtrisé (et c’est une nouvelle fois le cas dans ce tome 4 avec des illustrations assez flippantes), mais d’autres traînent un peu en longueur. Le tome 3 avait su à nos yeux relancer le récit, et ce tome 4 poursuit sur cette lancée. Même si certaines séquences auraient mérité d’être raccourcies (mais c’est le genre qui veut ça), on se laisse embarquer par les événements. Hyeon-Su veut bien faire et aider ses compagnons, mais il faut rappeler qu’il est infecté. Va-t-il se transformer en monstre ? Et si oui, à quel moment ? A l’image de son passage à l’âge adulte (le jeune homme a 18 ans et est souvent en plein doute), sa transition en monstre, si elle a lieu, est assez symbolique et symptomatique d’une jeunesse qui peine parfois à trouver sa place dans la société.
Notre héros a souffert de la perte de sa famille, même si tout n’était pas rose à la maison. La narration de ce tome 4 revient d’ailleurs sur certains événements, et tente même de nous faire douter. Tout ceci est-il un rêve ? Les flashbacks vécus par Hyeon-Su sont-ils réels ? Il bénéficie quoi qu’il en soit d’un peu plus de développement que dans les tomes précédents, et va rapidement être confronté aux autres survivants, certains étant très hostiles. Il règne parfois une ambiance à la The Thing dans ce tome 4 (difficile de savoir qui est réellement infecté ?), et la tension est une nouvelle fois au rendez-vous. Certaines répliques tombent néanmoins un peu dans le cliché (le geek qui parle avec des termes liés au jeu vidéo, le vieux en colère immédiatement qualifié de boomer), mais l’ensemble se lit bien et met en place des thèmes importants liés notamment aux valeurs démocratiques. Même dans ce genre de contexte post-apocalyptique, certaines règles ne doivent pas être oubliées. Des thèmes chers au cinéma de Romero par exemple, qui n’hésitait pas à mettre en avant les dérives de notre société dans ses films. « Sweet Home » est un peu moins poussé dans son développement et souffre parfois de remplissage, mais n’en reste pas moins accrocheur, donnant envie de poursuivre l’aventure !
Lageekroom